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Emotion, quand tu nous tiens....La beauté de l'intelligence rationnelle



Des années 90 à aujourd'hui, une intelligence critiquée

Popularisé par Daniel Goleman dans les années 90, l'intelligence émotionnelle s'est introduite dans le monde de l'entreprise comme incontournable. Si on en résume la teneur, il s'agit de tenir compte des émotions comme étant une intelligence en soi, un mode de d'appréhension du monde autre que l'intelligence rationnelle. 

Mais, comme le souligne cet article de Slate,  ( intitulé " le côté obscur de l'intelligence émotionnelle", le rationnel est revenu à la charge : on a clairement montré depuis que l'intelligence émotionnelle, gérée rationnellement, devient un redoutable instrument au service de la manipulation commerciale d'abord, psychologique ensuite. Les GAFA et les techniques de ventes, notre smartphone, nos émoticons, jouent sur l'intelligence émotionnelle. 

Voici donc le passage clé de l'article de Slate :
Un «usage stratégique de l’intelligence émotionnelle dans les organisations» peut ainsi en faire une arme redoutable au service de comportements mal intentionnés. D’une part, maîtriser ses émotions permet de masquer ses véritables intentions, et savoir reconnaître les émotions des autres peut aider à les manipuler dans un sens contraire à leurs intérêts.

L'utopie de l'Intelligence émotionnelle : l'émotion est-elle intelligente?

L'anthropologie de l'Intelligence émotionnelle est, comme son auteur, fortement bouddhiste, avec une couche scientifique de neuroscience. Ce sont des recherches passionnantes, mais encore expérimentales, non prouvées, et à la saveur utopiste : l'intelligence émotionnelle permettrait de contrôler les émotions au point de ne plus souffrir de ces mêmes émotions. Daniel Goleman, dans son livre d'entretiens avec le Delaï Lama, montre une anthropologie bouddhiste et scientiste à la fois, ainsi qu'une confiance dans le fait que sa science des émotions serait un progrès scientifique. Pour un chrétien, l'Intelligence émotionnelle comporte une dimension éthique que Goleman n'a pas abordée : l'intelligence rationnelle, se servant de l'intelligence émotionnelle, devra choisir entre le bien ou le mal, tandis que pour Goleman, le but est le contrôle de l'émotion. Ce qui différencie l'anthropologie chrétienne ici de l'anthropologie bouddhiste, dans le respect bien évidemment de la sagesse d'autrui, mais aussi dans une nécessaire connaissance mutuelle des différences, c'est la notion de contrôle

L'article suivant, l'intelligence émotionnelle, une compétence utile mais dangereuse, montre plus encore cet aspect de contrôle. ( source Gralon. net)
L'iE ( à ne pas confondre avec l'IA, quoique...), est devenue le terrain de préparation au contrôle par la méditation de pleine conscience. Sur ce sujet, voir notre article " faites le plein, (pas le vide)!".

Le contrôle émotionnel par la méditation de pleine conscience est-il fiable?

L'utilisation de l'intelligence émotionnelle dans une perspective thérapeutique a conduit à de cuisants échecs : les malades, sensés gérer leurs émotions, notamment des délinquants sexuels, récidivaient. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu de succès thérapeutiques aussi, mais l'utopie du contrôle peut mener à des désastres. L'empathie, dont Goleman s'est fait le chantre, n'est pas la compassion. L'empathie est pure émotion, elle peut transformer les personnes en "éponges" émotionnelles. Elle peut se retourner au gré de l'émotion la plus marquante, comme on le voit dans les mouvements de foule, empathiques, mais irrationnelles. La tyrannie des médias ( comme le montre le livre clé d'Ignacio Ramonet, La tyrannie de la communication ) est faite de manipulation de l'empathie. La compassion est une empathie raisonnée, non manipulable.
L'émotion, quand elle nous tient, ne peut être " contrôlée" que par la raison, et qui plus est, par la raison éthique. 

La méditation de pleine conscience, mise en application concrète des théories de l'IE, vise à suspendre la raison. 

 

La beauté de l'intelligence rationnelle : ne suspends jamais ta raison

Nous préférons donc revenir à une vision plus thomiste de l'intelligence,  qui tient compte de la connaissance de la faiblesse humaine, du péché originel (qui fragilise la volonté et les émotions de l'homme). L'intelligence rationnelle telle que développée par Aristote ne méprise pas les émotions, mais Aristote ne fait pas des émotions une intelligence : c'est là le noeud de l'utopie. Les émotions doivent être soumises à la raison, et non pas élevées au même rang que l'intelligence rationnelle. 

En les plaçant ainsi sur un piédestal, c'est un équilibre philosophique qui est perdu, avec ses conséquences, telles que décrite par l'article de Slate. Ne suspends jamais ta raison, c'est elle qui mène à la sagesse. En arrière fond de la théorie de l'intelligence émotionnelle, n'y a-t-il pas une dévaluation de l'intelligence humaine, la raison, au profit des émotions? Saint Thomas d'Aquin faisait confiance en l'intelligence humaine rationnelle. Faisons de même.


Anne  C.

Lundi 10 Juin 2019
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