Devant ma paroisse, il y a un joli petit pont, lieu d'observation stratégique à l'arrivée et à la sortie de la messe du dimanche.
Quand j'arrive, je peux toujours voir deux choses que j'aime dans ma paroisse : la porte toujours ouverte et, gardien digne de saint Joseph dans sa discrétion et sa dignité, monsieur P., plus fidèle que bien des paroissiens, plus fiable que mess'info pour les horaires, plus souriant que bien des Cathos ( vous savez, ceux qu'on appellent les petits Cathos secs).
Monsieur P. vous regarde toujours comme si vous étiez dans un salon avec lui, sans rien qui rappelle que la vie est dure pour lui plus que pour vous. Et quand on lui donne une pièce, on ne voit que son sourire qui s'adresse à la personne. Son merci s'adresse-t'il à Dieu, je ne sais. Ce que je sais, c'est ce que je peux observer depuis des années : visage buriné, sourire inaltérable, toujours debout, parfois chancelant, sans aucune aigreur ni plainte ( qui s'entende).
Et dans ma paroisse, tout le monde le connaît, lui dit bonjour, et le nomme par son prénom. Il n'est pas un anonyme.
Sauf ce dimanche, où à l'entrée de la messe, j'ai assisté à une petite scène qui m'a donné à penser. Un groupe de paroissiens, quatre ou cinq personnes, peut-être nouvelles chez nous, s'est retrouvé avec force embrassades sous le porche, à un mètre de monsieur P. Sans lui accorder un regard et au risque de lui marcher sur les pieds, ils donnaient l'impression de ne pas s'être vus depuis des mois. Ils formaient un joyeux cercle fermé. Et de mon petit pont, j'ai vu dans le regard de Monsieur P. une déception, une demande, un " je suis là", que j'ai interprété comme un " je voudrais bien un grand bonjour, moi aussi".
A ce moment, une belle adolescente habituée de la paroisse est arrivée. Elle s'est faufilée, a donné sa piécette préparée depuis quelques mètres déjà ( vous savez, ces pièces de monnaie qui doivent rester dans la poche extérieure du sac pour être accessibles quand un pauvre demande, un truc catho bizarre qui couvre une multitude de péché, l'aumône...)
Mais surtout, ce qui a couvert bien plus, c'est le retentissant : " Bonjour Monsieur P!" qui a illuminé le visage un instant assombri du cher portier aimé de la paroisse. Autrefois, le portier était une fonction liturgique, saint Pierre en sait quelque chose. Monsieur P. me fait penser à la fonction du pauvre devant notre porte : portier du ciel!
Revenons à notre petit groupe heureux de se retrouver entre soi sur le parvis. Ils n'ont rien vu. Je pense que le Pape François leur passerait un savon, pardon, nous passerait un savon à tous dans la paroisse avec un bon sourire paternel mais sans concession :
" Chère Paroisse, la périphérie commence à un mètre de vous, sur le parvis! "
Je conclus avec l'attitude de monsieur P. à Noël, qui m'a beaucoup touchée et me fait penser qu'il a bien compris, lui, le problème des périphéries. Son habituelle pancarte du pauvre était changée en une pancarte blanche avec écrit au feutre rouge en grosses lettres : " Joyeux Noël à tous!".
Leçon de périphérie bien reçue, monsieur P. !
Quand j'arrive, je peux toujours voir deux choses que j'aime dans ma paroisse : la porte toujours ouverte et, gardien digne de saint Joseph dans sa discrétion et sa dignité, monsieur P., plus fidèle que bien des paroissiens, plus fiable que mess'info pour les horaires, plus souriant que bien des Cathos ( vous savez, ceux qu'on appellent les petits Cathos secs).
Monsieur P. vous regarde toujours comme si vous étiez dans un salon avec lui, sans rien qui rappelle que la vie est dure pour lui plus que pour vous. Et quand on lui donne une pièce, on ne voit que son sourire qui s'adresse à la personne. Son merci s'adresse-t'il à Dieu, je ne sais. Ce que je sais, c'est ce que je peux observer depuis des années : visage buriné, sourire inaltérable, toujours debout, parfois chancelant, sans aucune aigreur ni plainte ( qui s'entende).
Et dans ma paroisse, tout le monde le connaît, lui dit bonjour, et le nomme par son prénom. Il n'est pas un anonyme.
Sauf ce dimanche, où à l'entrée de la messe, j'ai assisté à une petite scène qui m'a donné à penser. Un groupe de paroissiens, quatre ou cinq personnes, peut-être nouvelles chez nous, s'est retrouvé avec force embrassades sous le porche, à un mètre de monsieur P. Sans lui accorder un regard et au risque de lui marcher sur les pieds, ils donnaient l'impression de ne pas s'être vus depuis des mois. Ils formaient un joyeux cercle fermé. Et de mon petit pont, j'ai vu dans le regard de Monsieur P. une déception, une demande, un " je suis là", que j'ai interprété comme un " je voudrais bien un grand bonjour, moi aussi".
A ce moment, une belle adolescente habituée de la paroisse est arrivée. Elle s'est faufilée, a donné sa piécette préparée depuis quelques mètres déjà ( vous savez, ces pièces de monnaie qui doivent rester dans la poche extérieure du sac pour être accessibles quand un pauvre demande, un truc catho bizarre qui couvre une multitude de péché, l'aumône...)
Mais surtout, ce qui a couvert bien plus, c'est le retentissant : " Bonjour Monsieur P!" qui a illuminé le visage un instant assombri du cher portier aimé de la paroisse. Autrefois, le portier était une fonction liturgique, saint Pierre en sait quelque chose. Monsieur P. me fait penser à la fonction du pauvre devant notre porte : portier du ciel!
Revenons à notre petit groupe heureux de se retrouver entre soi sur le parvis. Ils n'ont rien vu. Je pense que le Pape François leur passerait un savon, pardon, nous passerait un savon à tous dans la paroisse avec un bon sourire paternel mais sans concession :
" Chère Paroisse, la périphérie commence à un mètre de vous, sur le parvis! "
Je conclus avec l'attitude de monsieur P. à Noël, qui m'a beaucoup touchée et me fait penser qu'il a bien compris, lui, le problème des périphéries. Son habituelle pancarte du pauvre était changée en une pancarte blanche avec écrit au feutre rouge en grosses lettres : " Joyeux Noël à tous!".
Leçon de périphérie bien reçue, monsieur P. !