L'amie qui m'a raconté cette histoire a une carte de grand voyageur. Elle parcourt pour son entreprise des milliers de kilomètres d'une gare à l'autre. Nous nous sommes rencontrées comme cela, un jour, dans un train. Ce petit récit pourrait être en France, en Italie, aux Etats-Unis...je brouille les pistes car il ne s'agit pas, comme vous verrez, de s'en prendre à un contrôleur sur le dos d'une quelconque entreprise nationale mais de bien plus.
Donc,un contrôleur jovial est passé, a vérifié nos billets et s'est éloigné. J'ai fait une remarque sur un détail du contrôle, et ma voisine m'a répondu :
" Oui, mais ce n'est pas toujours ainsi. Il y a quinze jours, je suis tombée sur un contrôleur qui était un véritable***..." Suivait un nom d'oiseau. Elle m'explique :
" Je voyage énormément. Et mon entreprise passe par une agence, qui valide mes billets sur ma carte Grand Voyageur International"
"Ah...? " Jusqu'ici, je ne voyais pas pourquoi cette dame charmante voulait me raconter son histoire.
" Oui, et la dernière fois, j'ai oublié de vérifier si tout était comme d'habitude, et je suis montée dans le train tranquille, avec ma place et les références envoyées par l'agence de voyage.
-Ah bon...
-Et le contrôleur est arrivé. Et là, il me dit que ce n'est pas un billet seulement une réservation et que j'aurais dû imprimer le billet électronique.
-Ok, et ?
-75€ d'amende, vous vous rendez compte! Alors que l'agence avait payé le billet. Alors je lui explique gentiment que d'habitude, je n'ai pas de billet électronique, que c'est une nouveauté, que la place a forcément été payée par l'agence puisque j'ai les références de ma place par internet et la carte d'abonnement qui va avec. Mais il me répond que je dois payer l'amende tout de suite et que l'agence me remboursera. Mais si je paye, le billet sera payé deux fois, c'est sûr, je lui explique. Mais il ne veut rien entendre.
Je commence à m’intéresser, parce que la voyageuse parle avec calme et rayonne d'une certaine gentillesse doublée de confiance qui me plaisent. Elle continue:
- et il ajoute, ce ***, que si je ne paye pas tout de suite, cela sera bien plus cher, il verbalisera bien plus...
Je dresse l'oreille : un petit tyran abuse de son pouvoir dans un train quelque part en Europe, prenant pour victime une personne de toute évidence bonne et sympathique. Qui va gagner ?
- Alors je lui explique encore une fois que je ne veux pas faire payer deux fois mon entreprise, qu'il n'y a pas fraude mais erreur humaine due à un changement de manière de réserver, que la prochaine fois j'imprimerai les billets électroniques, que j'ai une carte grand voyageur qui prouve que je ne fraude pas et suis une bonne cliente...il monte le ton et me répète que je n'ai pas de billet, donc je dois payer parce que je n'ai pas le billet sur moi, je n'aurais qu'à aller au guichet me faire rembourser. Mais je lui réponds qu'au guichet, ils ne pourront rembourser que l'entreprise et l'agence qui ont payé le premier billet qui a bien été payé déjà, et le deuxième est de ma poche, donc cela sera compliqué parce qu'il est bien marqué qu'on ne peut rembourser que si le billet a été payé deux fois par la même personne....
J'enregistre mentalement les détails du raisonnement, tout en appréciant de plus en plus le ton posé, le raisonnement tenace, la physionomie ouverte et calme, mais fermement attaché à son bon droit, de ma nouvelle amie.
" Alors le contrôleur, ce****, me dit que je n'ai qu'à me faire rembourser par mon entreprise, et il me menace d'une amende de 700 € pour refus d'obtempérer.
Là, je comprends soudain l'enjeu : le contrôleur-tyran se fait tentateur. Il me manquait un élément.
" Ben oui, il gagne un pourcentage sur chaque amende, mes amis m'ont dit. Donc, il espérait que j'allais faire payer mon entreprise, qu'on laisserait tomber ensuite. Et il me dit que la prochaine fois qu'il me verra dans le train, il ne m'aura pas oublié. Mais je lui réponds que moi, je l'aurais oublié, parce que les mauvais souvenirs, je les efface très vite. mais je n'aime pas l'injustice, et donc je ne vais pas laisser tomber. Je ne vais pas faire payer deux fois mon entreprise pour avoir la paix.
- Alors vous avez payé?
-Oui, il avait le pouvoir. Mais j'ai relevé son matricule, je suis allée au guichet où bien sûr on m'a dit qu'on ne pouvait pas me rembourser un billet payé à mon nom à la place d'un billet payé par l'agence. La place a été payée deux fois et le contrôleur m'a insultée et fait peur, et menacée uniquement pour un petit pourcentage. Alors, je ne vais pas lâcher, je vais faire une réclamation en bonne et due forme, avec son numéro de matricule, pour que cela n'arrive pas à d'autres. Parce que je n'aime pas l'injustice.
Voilà, voilà, l'enjeu : elle a résisté à tout : à l'épreuve de se faire voler, insulter, et à la tentation de faire payer son entreprise en se faisant rembourser à cause de la petite erreur qui consistait à ne pas l'avoir avertie du changement de type de réservation. Parce que son entreprise a payé, parce qu'elle-même n'aime pas voler, parce qu'elle pense à d'autres, elle ne lâchera pas l'affaire. Parce que ce n'est pas juste. Elle a même résisté à la tentation de laisser tomber. Le voleur/tentateur est tombé sur un bec : une gentille, mais pas une victime.
Elle n'est pas entré dans la tentation, dans le piège tendu par ce contrôleur/tyran/voleur/tentateur. Elle est restée gentille, calme, posée, bonne. Une crème de voyageuse.
Des personnes comme elle, cela met de très bonne humeur!!!
Buiss'Ardent
Voir pour plus de théologie, les articles ici! à partir de la réflexion de Benoît XVI dans son livre Jésus de Nazareth sur le Notre Père;
Donc,un contrôleur jovial est passé, a vérifié nos billets et s'est éloigné. J'ai fait une remarque sur un détail du contrôle, et ma voisine m'a répondu :
" Oui, mais ce n'est pas toujours ainsi. Il y a quinze jours, je suis tombée sur un contrôleur qui était un véritable***..." Suivait un nom d'oiseau. Elle m'explique :
" Je voyage énormément. Et mon entreprise passe par une agence, qui valide mes billets sur ma carte Grand Voyageur International"
"Ah...? " Jusqu'ici, je ne voyais pas pourquoi cette dame charmante voulait me raconter son histoire.
" Oui, et la dernière fois, j'ai oublié de vérifier si tout était comme d'habitude, et je suis montée dans le train tranquille, avec ma place et les références envoyées par l'agence de voyage.
-Ah bon...
-Et le contrôleur est arrivé. Et là, il me dit que ce n'est pas un billet seulement une réservation et que j'aurais dû imprimer le billet électronique.
-Ok, et ?
-75€ d'amende, vous vous rendez compte! Alors que l'agence avait payé le billet. Alors je lui explique gentiment que d'habitude, je n'ai pas de billet électronique, que c'est une nouveauté, que la place a forcément été payée par l'agence puisque j'ai les références de ma place par internet et la carte d'abonnement qui va avec. Mais il me répond que je dois payer l'amende tout de suite et que l'agence me remboursera. Mais si je paye, le billet sera payé deux fois, c'est sûr, je lui explique. Mais il ne veut rien entendre.
Je commence à m’intéresser, parce que la voyageuse parle avec calme et rayonne d'une certaine gentillesse doublée de confiance qui me plaisent. Elle continue:
- et il ajoute, ce ***, que si je ne paye pas tout de suite, cela sera bien plus cher, il verbalisera bien plus...
Je dresse l'oreille : un petit tyran abuse de son pouvoir dans un train quelque part en Europe, prenant pour victime une personne de toute évidence bonne et sympathique. Qui va gagner ?
- Alors je lui explique encore une fois que je ne veux pas faire payer deux fois mon entreprise, qu'il n'y a pas fraude mais erreur humaine due à un changement de manière de réserver, que la prochaine fois j'imprimerai les billets électroniques, que j'ai une carte grand voyageur qui prouve que je ne fraude pas et suis une bonne cliente...il monte le ton et me répète que je n'ai pas de billet, donc je dois payer parce que je n'ai pas le billet sur moi, je n'aurais qu'à aller au guichet me faire rembourser. Mais je lui réponds qu'au guichet, ils ne pourront rembourser que l'entreprise et l'agence qui ont payé le premier billet qui a bien été payé déjà, et le deuxième est de ma poche, donc cela sera compliqué parce qu'il est bien marqué qu'on ne peut rembourser que si le billet a été payé deux fois par la même personne....
J'enregistre mentalement les détails du raisonnement, tout en appréciant de plus en plus le ton posé, le raisonnement tenace, la physionomie ouverte et calme, mais fermement attaché à son bon droit, de ma nouvelle amie.
" Alors le contrôleur, ce****, me dit que je n'ai qu'à me faire rembourser par mon entreprise, et il me menace d'une amende de 700 € pour refus d'obtempérer.
Là, je comprends soudain l'enjeu : le contrôleur-tyran se fait tentateur. Il me manquait un élément.
" Ben oui, il gagne un pourcentage sur chaque amende, mes amis m'ont dit. Donc, il espérait que j'allais faire payer mon entreprise, qu'on laisserait tomber ensuite. Et il me dit que la prochaine fois qu'il me verra dans le train, il ne m'aura pas oublié. Mais je lui réponds que moi, je l'aurais oublié, parce que les mauvais souvenirs, je les efface très vite. mais je n'aime pas l'injustice, et donc je ne vais pas laisser tomber. Je ne vais pas faire payer deux fois mon entreprise pour avoir la paix.
- Alors vous avez payé?
-Oui, il avait le pouvoir. Mais j'ai relevé son matricule, je suis allée au guichet où bien sûr on m'a dit qu'on ne pouvait pas me rembourser un billet payé à mon nom à la place d'un billet payé par l'agence. La place a été payée deux fois et le contrôleur m'a insultée et fait peur, et menacée uniquement pour un petit pourcentage. Alors, je ne vais pas lâcher, je vais faire une réclamation en bonne et due forme, avec son numéro de matricule, pour que cela n'arrive pas à d'autres. Parce que je n'aime pas l'injustice.
Voilà, voilà, l'enjeu : elle a résisté à tout : à l'épreuve de se faire voler, insulter, et à la tentation de faire payer son entreprise en se faisant rembourser à cause de la petite erreur qui consistait à ne pas l'avoir avertie du changement de type de réservation. Parce que son entreprise a payé, parce qu'elle-même n'aime pas voler, parce qu'elle pense à d'autres, elle ne lâchera pas l'affaire. Parce que ce n'est pas juste. Elle a même résisté à la tentation de laisser tomber. Le voleur/tentateur est tombé sur un bec : une gentille, mais pas une victime.
Elle n'est pas entré dans la tentation, dans le piège tendu par ce contrôleur/tyran/voleur/tentateur. Elle est restée gentille, calme, posée, bonne. Une crème de voyageuse.
Des personnes comme elle, cela met de très bonne humeur!!!
Buiss'Ardent
Voir pour plus de théologie, les articles ici! à partir de la réflexion de Benoît XVI dans son livre Jésus de Nazareth sur le Notre Père;